revanche des épiceries et des arrière-pays dans les Cévennes et sur l’Aubrac
REPORTAGESous le double effet de la crise sanitaire et de l’arrivée de nouveaux habitants, lassés de la vie citadine, certains commerces de proximité du Gard et de la Lozère connaissent une forme de renaissance.
Le camion manque à nouveau déraper dans un tournant, il se rattrape puis s’arrête le long de la rivière, tout secoué encore des cahots de la route. L’aube pointe à peine. Des arbres lourds de neige se devinent dans l’obscurité, la route luit de verglas. Accoudés au petit pont, deux hommes parlent chèvres et châtaignes. Toutes les semaines, le véhicule de la société Magne s’engage dans les à-pics pour approvisionner l’épicerie de Sainte-Croix-Vallée-Française, 272 habitants en Lozère, à une heure trente de Mende. Nous y voilà. Murs peints en blanc, citation de Voltaire au-dessus du rayon fromages : « J’ai décidé d’être heureux parce que c’est bon pour la santé. » Un bouddha sourit du côté des légumes, on décharge des granulés de bois devant la porte.
Voilà bientôt cinq ans que Marisa et David ont repris ce magasin. Ils encaissent aussi les amendes, envoient les Colissimo, vendent les billets de train depuis que l’Etat a fermé ses propres guichets. Tous les deux viennent d’Alès : elle travaillait dans un hypermarché, lui était restaurateur. Un divorce chacun, la quarantaine, et ce comptoir au bout de la route, l’anti-start-up par excellence. Dans la famille de Marisa, on s’est étonné : « Mais qu’est-ce que vous allez chercher là-bas ? »
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